Archéologie préhistorique : la Moravie, cœur battant de la civilisation gravettienne

Aux heures les plus profondes de la normalisation en Tchécoslovaquie, il est tout de même des activités et des rencontres internationales qui sont passées à travers les mailles de la censure, des contraintes de visas et du rideau de fer. C’est ainsi qu’au début de sa carrière de paléoanthropologue, Marcel Otte, grand spécialiste des Homo sapiens, a sillonné les terres moraves, région orientale de la République tchèque actuelle, à mi-chemin entre Bohême et Slovaquie dans la Tchécoslovaquie d’alors. Au cours de ces recherches aux côtés d’archéologues tchèques de renom, comme Martin Oliva, le présent politique de l’époque communiste s’est mêlé aux considérations scientifiques attachées à étudier un lointain passé imprégné des caractéristiques de la civilisation gravettienne. Au micro de RPI, Marcel Otte est notamment revenu sur la richesse de la tradition archéologique tchèque dans le domaine de la préhistoire et sur les particularismes du cas morave de cette civilisation lointaine (31 000 – 23 000 avant le présent).

Marcel Otte, vous êtes paléoanthropologue, professeur émérite de préhistoire de l’université de Liège, vous êtes l’incontournable spécialiste des Homo sapiens, nous donc, ou en tout cas, ceux dont nous descendons. Et c’est chez les Homo sapiens qui peuplaient jadis la Moravie que j’aimerais aller aujourd’hui par le biais de cette discussion. La Moravie, c’est la terre orientale de la Tchéquie actuelle et c’est aussi une terre que vous avez parcourue jadis dans le cadre de vos recherches. Peut-on en rappeler le contexte ?

Marcel Otte | Photo: Mary Etienne,  Wikimedia Commons,  CC BY-SA 3.0

« C’était toute une aventure. En effet je m’intéresse à l’Homme moderne, à ses différentes traditions culturelles, à son évolution, à sa distribution à travers l’Europe. Ce qui m’intéresse surtout, ce sont les contacts entre l’Europe centrale, orientale et l’Europe occidentale. Il fallait donc que j’aille voir sur place car il faut dire que les écoles de préhistoire sont très différentes à travers le continent : il fallait donc qu’avec une formation particulière à l’ouest j’applique les mêmes méthodes d’abord en Europe centrale, en Moravie donc, et puis je suis allé plus loin à l’est. C’était l’idée théorique de départ : comparer les civilisations autour de 30 000 ans. L’Homme moderne apparaît en Europe vers 40 000 et le cœur de son développement se place entre 25 et 30 000 ans. Il fallait donc que je comprenne ce qu’il s’est passé d’un côté à l’autre du continent. Evidemment, il n’y avait pas de frontières politiques à l’époque : il s’agissait de peuples nomades qui traversaient l’ensemble du continent, depuis l’Oural jusqu’à l’Atlantique. L’idée était donc de comprendre avec les mêmes méthodes, le même regard l’ensemble de ce continent. »

Alors pourquoi la Moravie en particulier ?

« La Moravie est particulièrement riche en vestiges préhistoriques, avec des écoles intellectuelles extrêmement puissantes, qui ont été plutôt d’obédience russe avant-guerre. Pour l’instant, il y a donc plutôt une définition plutôt autonome tchèque, même si au départ, elles étaient plus sous l’influence de Saint-Pétersbourg. Ça, c’est du point de vue de la méthode.

Mais du point de vue de l’importance de cette région, il faut dire que nous sommes au centre du continent sur le plan géographique. D’autre part, nous sommes loin des mers, ce sont donc des populations qui étaient migrantes, qui chassaient le mammouth principalement mais aussi le renne, le cheval et qui étaient particulièrement bien représentées en Moravie. Là, nous sommes en effet entre deux aires : entre l’aire septentrionale soit la Pologne actuelle, et l’aire méridionale, c’est-à-dire l’Autriche actuelle. Il y a là une concentration importante de sites du fait qu’il y a des matériaux de pierre abondante, de qualité, et une chasse très fructueuse. C’est en effet une région très giboyeuse pendant ce qu’on appelle le pléistocène.

Pavillon Anthropos | Photo: Musée régional Morave

D’autre part, il y a un dépôt lœssique soit un dépôt sédimentaire apporté par le vent. De telle sorte qu’il est déposé très rapidement et de façon légère : le vent ne perturbe pas comme une rivière les vestiges archéologiques qui sont dessous. Donc dans cette espèce de golfe du bassin de Vienne, au nord de Vienne, via Brno et jusqu’à la frontière polonaise, il y a ces dépôts éoliens qui ont cette particularité d’être carbonates : ils n’ont pas d’acide, ils n’attaquent pas les matières organiques, se déposent de manière couvrante. On parle d’un manteau de lœss.

Archeopark Pavlov | Photo: Ondřej Tomšů,  Radio Prague Int.

Il y a donc ces aspects contingents, géographiques et culturels. Et en même temps, une recherche pionnière qui déjà au XIXe avait étudié ces sites-là qui sont gigantesques : Dolní Věstonice, Pavlov également… Il y a donc toute cette raison d’être : les sites sont riches, importants, bien conservés, bien étudiés… »

Vous avez écrit un très bel article dans Anthropologie, International Journal of Human Evolution and Diversity, où vous revenez de manière très poétique sur un de ces séjours en Moravie dans les années 1970, avec Martin Oliva, également préhistorien. Vous y mêlez à la fois l’expérience personnelle du moment et la description et l’analyse d’artefacts de la civilisation gravettienne que vous étudiez à la faveur de ces séjours. Peut-on rappeler le contexte dans lequel vous avez effectué ces séjours ?

Marcel Otte | Photo: Archives personnelles de Marcel Otte

« D’abord, je dois vous faire un aveu tout-à-fait sincère : mes projets scientifiques sont un prétexte à l’aventure. Ces raisons sont légitimes, officielles et sincères, mais en même temps, à l’époque il s’agissait d’une situation politique particulière et difficile puisque nous étions toujours au-delà du rideau de fer, dans des régions sous l’emprise soviétique. Les lois étaient donc extrêmement strictes. Cela m’intéressait de passer ce rideau de fer et d’aller voir de l’autre côté. Il y a donc d’une part ce pays étrange qu’était à mes yeux la Moravie du point de vue de la population, de leur esprit et de leur histoire, et d’autre part, la coercition qu’imposait le régime. C’était donc pour moi une sorte de bravade : il fallait que j’y aille ! En outre, je faisais partie d’Amnesty International à l’époque et j’apportais des documents à mes amis sur place. C’était toute une série de contraintes qui me stimulaient.

Après avoir passé toutes ces difficultés, nous devions traverser l’Allemagne de l’Est qui était encore plus contraignante, la Pologne, avant de rejoindre la Moravie. Il y avait là une découverte des pays slaves sous le contrôle de Moscou sur le plan de la culture et des contacts humains. L’empire soviétique avait cela de ‘bien’, si l’on peut dire, qu’il maintenait ce type de cultures et la recherche scientifique sous cloche. Quand on venait d’Occident, on avait là un monde qui, aujourd’hui, s’uniformise malheureusement. Il y a un peu à boire et à manger dans ce que je dis là, mais disons que pour moi qui venais d’Occident, qui découvrais, derrière ces frontières, un monde cristallisé, comme s’il n’avait pas bougé depuis avant la guerre. C’était très intéressant – comme s’il était encore un peu médiéval… et avec des valeurs très riches, affectives et musicales.

Martin Oliva | Photo: Adam Kebrt,  ČRo

Je me suis en effet fait des amis, comme Martin Oliva, et d’autres qui sont toujours des amis intimes jusqu’à aujourd’hui. Quand on a traversé ces différentes contraintes, on se rend compte que les gens avaient le cœur ouvert. Il y a une chaleur que j’ai ressentie dans les paysages : des reliefs mollement vallonnés avec des alternances de rivières et de bois, il y a du bon vin et de la bonne chère. Même s’ils étaient très pauvres à l’époque, ils partageaient volontiers tout ce qu’ils avaient. Je n’avais évidemment pas d’argent à l’époque puisque j’étais un chercheur désœuvré : je logeais chez les habitants où j’ai toujours été très chaleureusement accueilli. On chantait le soir, au son d’une guitare, et même si je ne comprenais pas le tchèque, on se comprenait par les sourires, les regards… Il y avait un peu d’allemand qui traînait, quelques mots de russe aussi que je maîtrisais. Tout cela se passait très bien, avec Martin et d’autres qui ont hélas disparu : il y a toujours eu cette chaleur et cette poésie que vous évoquiez, quelque chose d’intermédiaire entre la pensée de la science et de la préhistoire – il y a quelque chose de poétique dans la préhistoire puisqu’on va découvrir quelque chose de riche et de passé – et cette démarche scientifique où se mêlaient la volonté d’aimer les autres et la vie, et la rigueur scientifique. La limite entre les deux n’était pas très claire, c’est ce que j’appréciais particulièrement. »

Photo: Musée régional Morave

Revenons sur votre objet d’études, la civilisation gravettienne, et celle qui concerne la Moravie en particulier : peut-on préciser en quoi la civilisation gravettienne en Moravie était spécifique par rapport à celle évoluant plus à l’Ouest ? Comme vous l’avez dit, il n’y avait pas de frontières, les gens bougeaient, mais il pouvait y avoir des variantes locales…

Marcel Otte | Photo: Archives personnelles de Marcel Otte

« Il faut dire qu’elle couvre toute l’Europe, puisqu’on la retrouve aussi bien en Russie qu’en France. Mais en même temps, la Moravie présente une très grande continuité de cette civilisation-là. Elle est peut-être la plus ancienne : certains de mes collègues pensent même qu’elle provient de là. Cela ne me paraît démontré mais elle est très ancienne et dure longtemps. Il n’y a pas eu les interruptions que nous avons eues en Occident. D’autre part, cette situation particulière nous a appris l’humilité parce que ce que l’on trouve de cette civilisation en Occident est apparu désormais comme un reflet indirect de ce qui se passait en Moravie : donc c’était marginalisé par rapport au cœur qu’était la Moravie. Pour mes amis français, cela a été difficile à admettre qu’ils n’avaient pas été les centres du monde, mais qu’ils avaient été à la marge. Ce n’est pas mal non plus, mais cela reste la marge d’un centre qu’était la Moravie et le bassin de Vienne, une même unité culturelle et géographique. Cela m’a fasciné. D’autre part, il y avait pas mal de sépultures dans ces sites moraves qui permettaient d’analyser l’anatomie de ces premiers hommes modernes : on pouvait ainsi voir qu’ils avaient encore des traits archaïques, on voyait qu’il y avait une transition entre les Néanderthaliens et ceux qui allaient devenir des hommes modernes, donc quelque chose qui était au cœur. Et puis, le fait que ce soit sous le lœss, donc bien conservé, nous permettait d’avoir une idée de l’habitat, du mode de vie et de l’art. Il y avait de nombreuses statuettes ou des décorations corporelles portées sur les vêtements. Le plus impressionnant, ce sont les statuettes de terre cuite : il y avait donc une maîtrise de la terre cuite, de l’argile, modelée puis cuite. On a même retrouvé des fours à céramique ce qui, ailleurs, n’existe pas avant le Néolithique, avant le VIe millénaire qui est beaucoup plus tard. Cette importante gamme de statuettes humaines ou animales est un reflet de la mythologie. En Occident, il y a l’art pariétal, l’art sur les parois, là il y a un art modelé qui atteste la mythologie. »

Archeopark de Pavlov | Photo: Ondřej Tomšů,  Radio Prague Int.

Vous parlez de fours à céramique, cela suggère que ces gens devaient rester sur place un certain temps… On associe la sédentarité à l’agriculture, beaucoup plus tardive, au Néolithique, or vous dites dans cet article que ce qui est intéressant dans le cas morave, c’est que ce sont des populations prédatrices, mais sédentaires également…

« Oui, je pense que le point de départ est faussé, car, comme vous venez de l’évoquer, on associe souvent production alimentaire et sédentarité, et à l’inverse, les prédations avec la mobilité. Je pense que c’est trop radical, il peut y avoir des situations inverses ou mélangées. En tout cas, en ce qui concerne la Moravie, on voit bien qu’il y a bien au moins une partie de la population qui est sédentaire, voire l’ensemble, mais par périodes. Les fours à céramique nécessitent en effet une durée d’occupation importante, pour les bâtir, pour les utiliser et cela semble démontrer qu’il y avait une sédentarité même dans une civilisation prédatrice. Pourquoi pas ? Cela existe en Asie centrale aujourd’hui encore où une partie de la population est mobile et prédatrice alors que l’autre partie est sédentaire et productrice. Il ne faut donc pas écarter l’hypothèse.

Photo: Musée régional Morave

En tout cas, cette population nomade était très dense : on trouve des traces d’habitats gigantesques qui montrent bien qu’il y avait une population régulière, pour ne pas dire sédentaire, et importante. Depuis lors, mon ami Martin a fouillé d’autres sites que Dolní Věstonice, comme Milovice, où l’habitat semble plus important en termes d’architecture, plus massif. Cela demande donc beaucoup de monde rien que pour le construire et l’utiliser. D’ailleurs, nous nous demandons si ces grandes constructions massives n’avaient pas plutôt affaire avec le rituel – ce seraient donc plutôt des temples – qu’avec l’habitat qui était généralement sous tente et très léger, sans laisser de traces si lourdes. Il y a donc probablement des temples qui auraient correspondu aux grottes de France où la décoration est sur les parois et crée un espace couvert. Si elle n’existe pas, comme en Moravie, alors il faudrait concevoir qu’on ait pu le construire avec des ossements de mammouth. Les mammouths y sont représentés par centaines, donc on imagine mal que ces populations aient abattu de telles hordes… En réalité, ils récoltaient plutôt les ossements d’animaux morts pour construire ces bâtiments gigantesques qui, à mes yeux, pourraient bien correspondre à des temples. »

Citons quelques exemples, dont vous avez mentionné quelques-uns : la Vénus de Věstonice, des sépultures collectives… Il y a aussi le chaman de Brno, dont on a parlé récemment sur notre antenne. Vous le mentionnez dans votre livre Cro Magnon. Aux origines de notre humanité, et il a été étudié également par Martin Oliva. Que nous disent toutes ces découvertes sur ces hommes d’alors, du point de vue de leurs croyances, de leur imaginaire ?

Archeopark de Pavlov | Photo: Ondřej Tomšů,  Radio Prague Int.

« Au point de départ, on peut dire qu’il n’existe pas de population qui n’ait pas de mythologie. Il faut que la conscience collective soit satisfaite, soulagée de ses interactions fondamentales : il y a donc toujours une forme de mythologie. Sur le plan structurel, on peut dire que les populations chasseuses entretiennent, avec ce qui n’est pas elle, une mythologie à base animale puisque c’est l’animal qui se comporte de manière analogue à l’humanité mais échappe à la structure sociale. Ce sont donc souvent des mythologies axées sur le monde animal. Comme si l’animal permettait d’accéder au cosmos, aux forces naturelles qui ne sont pas contrôlées par l’Homme. En même temps, les cortèges animaux sont à peu près les mêmes : les statuettes en Moravie correspondent aux même espèces représentées dans les grottes à l’Ouest, en France ou en Espagne. On voit qu’il y avait une mythologie commune dont les expressions classiques varient selon les circonstances.

Martin a en effet travaillé sur l’Homme de Brno. Dans ce genre de situation, la mythologie structurellement animalière présente des variations dans les rituels. Les rituels ne sont pas à confondre avec la mythologie : la mythologie est une explication, le rituel est une manière de la revitaliser. La statuette de Brno (est humaine, masculine et accompagnait une sépulture, de telle sorte que celle-ci est considérée comme celle d’un chaman parce que durant le rituel chamanique, l’officiant est considéré comme mort, tué : un substitut de sa vie à lui est restitué soit dans une image paléolithique, soit dans une statuette. C’est d’ailleurs toujours le cas en Extrême-Orient. Cette statuette incarne la personne lorsqu’elle est en extase et qu’elle quitte le milieu social humain. C’est probablement ce qui s’est passé à Brno, et c’est très rare, particulièrement en Europe. »

La statuette de Brno | Photo: Zde,  Wikimedia Commons,  CC BY-SA 4.0 DEED

Précisons que la statuette est articulée, avec l’idée qu’elle soit animée pendant un rituel…

« C’est possible, probable même. Il y a des tenons aux bras qui montrent que c’était mobile. C’est très étonnant. Et tout cela était fait en ivoire de mammouth ce qui est déjà un référent indirect à l’animal lui-même. »

De manière globale, le territoire tchèque, Bohême et Moravie, est riche en vestiges archéologiques datant de la Préhistoire. Si l’on considère cela de manière globale et sur le temps très long, rappelons quelques découvertes évoquées sur notre antenne : le crâne de Zlatý Kůň, dont la datation a été repoussée à 45 000 ans et plus, la Moravie, donc, avec un vrai berceau civilisationnel, plus ‘récemment’, il y a 7 000 ans, une architecture monumentale concentrique, plus ancienne que Stonehenge… Y a-t-il quelque chose de spécial dans cette région d’Europe qui a fait que ces populations y ont évolué ?

« Je ne sais pas, peut-être la situation interculturelle entre l’Est et l’Ouest de l’Europe. Il y a une sorte de concentration non seulement de populations, mais surtout d’idées, une sorte de foyer qui fait que les idées évoluent plus rapidement et plus harmonieusement. Il y a une solidarité tchèque qui m’a toujours paru évidente, et peut-être qu’il y avait une solidarité similaire à la période préhistorique – pourquoi pas ? Il y a un foyer qui s’auto-entretient. Comme je vous le disais, les autres parties de l’Europe sont plutôt marginales à l’époque et reçoivent des influences extérieures. Tandis qu’en Moravie non, c’est vraiment local, c’est développé à toutes les époques avec des traits culturels tout à fait spécifiques qui vont rayonner à partir de là.

La Bohême, je la connais moins bien. J’ai été écrasé par le prestige historique de la ville de Prague, j’étais plutôt fasciné par cette architecture splendide et j’ai moins prêté attention, je dois dire, aux périodes paléolithiques par ailleurs moins bien représentées qu’en Moravie. J’étais donc plus intéressé par les périodes historiques que préhistoriques en Bohême. »

Photo: Musée régional Morave

Pour terminer, une question liée à l’actualité. Très récemment, le Prix Nobel de médecine a été attribué à Svante Pääbo, un généticien suédois qui a grandement contribué aux recherches ADN, et notamment sur les populations préhistoriques de Dolní Věstonice. Quelle belle reconnaissance pour ces découvertes et ces bonds en avant qu’on a faits ces derniers temps, grâce aussi à la génétique, et qui permettent d’avoir une meilleure connaissance de ceux qui nous ont précédés…

Photo: Musée régional Morave

« J’ai deux choses à dire : une positive et une négative. La positive c’est qu’il s’agit d’une reconnaissance de l’importance de la Préhistoire. Le Prix Nobel, on ne peut pas aller plus haut ! L’aspect négatif, c’est que je ne suis pas du tout convaincu par l’ADN fossile. J’ai l’impression qu’il y a beaucoup d’exagérations dans ses capacités. Pour une raison toute simple : en archéologie, nous travaillons sur des comportements, pas sur la biologie. Nous n’avons rien à faire avec la biologie, mais travaillons sur les comportements, les valeurs et sur leur expression. Ce qui nous intéresse, c’est l’évolution des sociétés dans leurs systèmes de valeurs. Je ne pense pas que la biologie puisse jamais nous éclairer là-dessus : il y a donc une partie d’esbroufe. C’est également lié à la hiérarchie des sciences à laquelle je suis totalement allergique. Vous parliez de poésie : ce n’est pas la biologie qui va nous en apprendre beaucoup là-dessus. La hiérarchie des sciences fait que les sciences médicales sont placées au-dessus des sciences humaines : cela me paraît être une grave erreur. La musique par exemple ne laisse aucune trace ADN… Moi, je suis du côté des sciences humaines donc cela me laisse un peu perplexe. »

Auteur: Anna Kubišta
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