Obus pour l’Ukraine : soutenue par une vingtaine de pays, la Tchéquie revoit l’objectif à la hausse
L’initiative tchèque pour mutualiser l’achat de munitions pour l’armée ukrainienne a été rejointe récemment par de nouveaux États et Prague évoque désormais le chiffre d’un million et demi d’obus.
« L'Ukraine est confrontée à une grave pénurie d'obus d'artillerie et l'initiative tchèque contribuera à financer la livraison de munitions à l'Ukraine, un élément vital pour la défense du pays », peut-on lire dans le communiqué publié mardi par le gouvernement islandais, qui précise qu’ « environ deux millions d'euros seront consacrés à ce projet ».
Le même jour, la Slovénie a également confirmé sa participation à hauteur d’un million d’euros à cette initiative tchèque très remarquée ces dernières semaines par la presse internationale, avec désormais une vingtaine de pays déjà partie prenante, la Pologne indiquant récemment qu’elle participerait non seulement financièrement mais aussi au niveau logistique. Ce mercredi, le Portugal s'est aussi engagé à contribuer.
Si Dmytro Kuleba, ministre ukrainien des Affaires étrangères a estimé que les premiers obus pourraient arriver un Ukraine « dans un futur proche », aucun délai n'a été précisé pour l'instant.
Interrogé sur le sujet lundi par Bloomberg, le chef de la diplomatie tchèque, estime que « nous pouvons faire beaucoup plus que le chiffre initialement annoncé ».
À l’origine, Prague avait annoncé un total de 800 000 obus, achetés en Europe et ailleurs - Jan Lipavský a indiqué au média économique américain que le chiffre d’un million et demi pourrait être atteint.
« Cela aide déjà l'Ukraine à mieux combattre »
Selon le ministre, même si ces munitions vont encore mettre du temps à être livrées à l’armée ukrainienne, l’initiative change déjà la donne sur le front.
« Comme nous le voyons, cela aide déjà l'Ukraine à mieux combattre, parce qu'elle sait qu'elle aura un approvisionnement en nouvelles munitions, ce qui a changé sa perspective sur l'utilisation des stocks actuels », a déclaré Jan Lipavský.
Présenté concrètement à Paris fin février par le Premier ministre Petr Fiala, ce plan de Prague pour mutualiser l’achat d’obus pour l’artillerie ukrainienne est vu comme un véritable succès des autorités tchèques.
« Je pense que cela mérite d’être salué : la Tchéquie arrive enfin à porter un agenda positif au niveau européen, à faire avancer des propositions et à trouver des alliés, ce que la Tchéquie comme d’autres pays d’Europe centrale et orientale avaient auparavant du mal à faire », a rappelé le politologue Lukáš Macek sur nos ondes.
Comme l’Islande, le Canada fait partie des pays non-membres de l’UE à avoir promis de contribuer à cet achat d’obus, tandis qu’il n’est pas inintéressant d’observer quels États refusent de participer : récemment le chef de la diplomatie autrichienne a fait valoir la neutralité militaire de son pays pour justifier ce refus, tandis que ses homologues slovaque et hongrois, qui viennent tous les deux de serrer la main à Sergueï Lavrov, rejettent toute idée d’aide militaire à l’Ukraine agressée.
Déjà des munitions à Vrbětice en 2014
Les détails de cette « opération munitions » d’envergure menée par les Tchèques seront peut-être décrits un jour – ou bien resteront confidentiels comme beaucoup d’affaires conclues avec des « marchands de canons » et qui sentent la poudre, au sens propre du terme.
Cruciales pour la survie de l’Ukraine indépendante aujourd’hui, les munitions étaient déjà tragiquement au cœur des relations entre Prague, Kyiv et Moscou avant 2022.
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En 2014, il y a dix ans, ce sont selon le contre-espionnage tchèque les services russes qui ont fait exploser un entrepôt de munitions apparemment destinées à l’Ukraine (où la Crimée venait d’être envahie), tuant deux civils dans cet attentat.
Et un mois exactement avant l’invasion russe de grande ampleur de l’Ukraine en 2022, le 24 janvier, le gouvernement tchèque prenait déjà les devants : « Nous prévoyons d'approuver la demande de fourniture des munitions nécessaires lors du Conseil des ministres », indiquait le chef du gouvernement tchèque sur ce qui s'appelait encore Twitter, ajoutant communiquer « avec la partie ukrainienne et l'ensemble de cette affaire sera surveillé et évalué en permanence par la cellule de crise du ministère des Affaires étrangères. Si nécessaire, d’autres étapes suivront ».
Nécessité, il y a évidemment eu et il y a hélas encore - plus de deux ans après.