Réduction de la valorisation des retraites : la Cour constitutionnelle donne raison au gouvernement

La Cour constitutionnelle

C’est une décision qui pourrait bien faire date dans l’histoire de la prochaine réforme des retraites en Tchéquie. Mercredi, la Cour constitutionnelle a rejeté un recours déposé par le parti d’opposition ANO visant à abroger l’amendement à la loi sur les retraites qui a permis de réduire la valorisation des pensions. Cette mesure avait été adoptée par le gouvernement l’année dernière dans le cadre d’une procédure législative accélérée. Aux yeux des juges, l’arrêt rendu vise, entre autres, à assurer la pérennité du système de retraite à l’avenir.

En Tchéquie comme ailleurs, les retraites sont mises à l’épreuve de l’inflation. C’est la raison pour laquelle, l’année dernière, alors que l’inflation dans le pays était encore très élevée, le gouvernement, désireux de maîtriser davantage ses dépenses, a modifié le mécanisme d’indexation des pensions. La loi tchèque, en effet, prévoit une valorisation annuelle des pensions de retraite en fonction de l’inflation. Or, en 2022, l’augmentation moyenne des prix à la consommation a été de l’ordre de 15,1 %, soit le deuxième indice annuel le plus élevé de ces trente dernières années.

Une situation à laquelle la coalition gouvernementale dirigée par le conservateur Petr Fiala a décidé de réagir, entre autres, en ajustant cette indexation régulière. Et pour rendre cet ajustement possible, un amendement a été adopté en procédure accélérée (qualifiée d’urgence dans le droit tchèque) par le Parlement en mars 2023 ; soit donc après que le projet n’a fait l’objet que d’une seule lecture à la Chambre des députés puis au Sénat.

Ce mode de fonctionnement a fortement déplu à l’opposition, et notamment à 71 députés du mouvement populiste ANO, dirigé par l’ancien Premier ministre Andrej Babiš, qui ont estimé que le gouvernement avait abusé de la procédure et ont donc sollicité l’avis de la Cour constitutionnelle. Un avis que ses juges ont rendu mercredi, en rejetant leur recours.

Entre-temps, suite à l’application de l’amendement dès juin 2023, les pensions de retraite, dont le montant moyen s’élève actuellement à un peu plus de 20 000 couronnes (815 euros), ont certes augmenté, mais dans une mesure moindre que celle à laquelle les retraités s’attendaient initialement. En moyenne, le montant des pensions a été inférieur de quelque 1 000 couronnes (40 euros) que ce qu’il aurait pu être sans l’intervention du gouvernement. Celui-ci, dans sa volonté de réduire le déficit des finances publiques, a justifié cette moindre valorisation par le principe de responsabilité budgétaire.

Photo illustrative: René Volfík,  iROZHLAS.cz

Une vision des choses partagée par la Cour constitutionnelle. Dans l’arrêt qu’elle a rendu mercredi, celle-ci estime qu’il n’existe pas de droit fondamental à une augmentation permanente des pensions ou à une copie de l’inflation et que, au contraire, il est du devoir de l’État de tenir compte de l’état des finances publiques et de la viabilité à long terme du système de retraite.

Président de la Cour constitutionnelle, Josef Baxa a déclaré que l’arrêt rendu était aussi une décision pour l’avenir. La Cour s’est dite consciente de la vulnérabilité des retraités, tout en soulignant que leurs pensions avaient été valorisées à plusieurs reprises et que l’inflation les affectait donc un peu moins que d’autres catégories de la population. Mercredi, le chef du gouvernement Petr Fiala s’est félicité que la position de son cabinet n’ait pas été remise en cause :

Petr Fiala | Photo: Vít Šimánek,  ČTK

« Je suis satisfait que les arguments que nous avons avancés devant la Cour constitutionnelle aient été retenus. Le verdict est important pour la pérennité du système de retraite, des finances publiques et de la solidarité entre générations dans notre pays. Je tiens à remercier les ministres des Affaires sociales et des Finances pour leur argumentation convaincante devant la Cour. »

Dans l’ensemble, la plupart des ministres et économistes sollicités ont estimé que, au-delà du jugement du recours déposé par l’opposition au sujet de la procédure législative accélérée, l’arrêt rendu par la Cour constitutionnelle exprime aussi plusieurs nécessités : la nécessité de respecter une certaine solidarité intergénérationnelle et de tenir compte non seulement de l’état actuel des finances publiques et de la situation des retraités, mais aussi la nécessité de penser à l’avenir et de faire en sorte que non seulement ceux qui ont participé au développement du pays (les retraités), mais aussi ceux qui contribuent à son développement aujourd’hui (les travailleurs) et ceux qui y contribueront à l’avenir (les plus jeunes générations), puissent bénéficier de pensions de retraite décentes eux aussi.