Zéro coin à champignons : chaleur et sécheresse mettent à mal le sport national
Si le beau temps et les hautes températures font généralement le plaisir des vacanciers, ceux qui aiment passer leur temps libre à cueillir les champignons se réjouissent certainement moins des vagues de chaleur qui frappent la planète depuis plusieurs étés. Cette année, les Tchèques – à propos desquels on dit souvent que la cueillette des champignons est leur sport national – restent clairement sur leur faim : les champignons ne poussent pas – « nerostou ».
Etes-vous plutôt cèpes, girolles ou coulemelles ? champignons séchés ou marinés ? omelette aux champignons ou champignons panés ? Cet été, à vrai dire, peu importe : si la République tchèque compte beaucoup de forêts et sites naturels accessibles librement, vous n’avez actuellement guère de chance de trouver des champignons dans les sous-bois. Pour la Radio tchèque, la mycologue Tereza Tejklová fait le point sur la situation actuelle :
« A l’heure actuelle, les forêts sont vides, et ce sur l’ensemble du pays. Ce n’est pas que tout a été ramassé ; c’est véritablement que les champignons ne poussent pas. Il suffit d’ailleurs de regarder par la fenêtre : avec un soleil torride comme celui-ci, et pas vraiment de pluie à l’horizon, pas étonnant que les champignons n’aient pas envie de pousser ! »
(Ne pas) pousser comme des champignons
Mise à disposition depuis peu sur le site de l’Institut hydrométéorologique tchèque (ČHMÚ), une carte actualisée présentant la probabilité de pousse des champignons dans le pays en fonction des précipitations et des températures des jours précédents confirme les propos de Tereza Tejklová : au moment de la rédaction de ce texte, à l’exception de minuscules zones isolées dans les Carpates blanches, la carte est un panaché d’orange et de rouge, ce qui indique une probabilité de pousse des champignons faible à très faible.
L’angoisse du panier vide
De quoi donner des angoisses aux chasseurs de champignons ! Et le réchauffement climatique, avec son lot d’épisodes de chaleur extrêmes et ses précipitations moindres, mais aussi ses sécheresses, incendies et catastrophes naturelles plus fréquentes, ne présage pas d’un avenir plus fructueux. A terme, les Tchèques risquent-ils de revenir de leur chasse le panier systématiquement vide ? Tereza Tejklová n’est pas si catégorique :
« Je n’affirmerais pas que les champignons vont disparaître des forêts tchèques, car après tout, il pousse bien des champignons dans le sud de l’Italie, et dans tout le sud de l’Europe en général. Il s’agit cependant d’espèces différentes de celles qui poussent en République tchèque, ou bien des espèces qui sont rares chez nous sont beaucoup plus abondantes là-bas. A l’inverse, on n’y trouve pas certaines espèces de champignons qui poussent dans les régions plus fraîches. Mais une disparition générale des champignons n’est nullement à craindre. »
« La disparition des forêts est aussi un problème pour la pousse des champignons. Mais à l’heure actuelle, le problème le plus important, c’est l’absence de précipitations. »
Champions en champignons
On l’a bien compris : en l’état actuel des choses, il ne faut pas s’attendre à ce que les champignons poussent « comme des champignons après la pluie », comme le dit si bien le proverbe tchèque. Passe-temps très répandu dans le pays, on entend souvent que la cueillette des champignons est le sport national des Tchèques. Mais pour en assurer la continuité, sa pratique devrait-elle être réglementée, à l’image d’autres pays ? Tereza Tejklová :
« En Suisse, des restrictions ont été mises en place, aussi bien en matière de quantité de champignons ramassée qu’en jours de cueillette. Alors qu’en République tchèque, nous pouvons faire comme bon nous semble… et j’ai vraiment du mal à imaginer une éventuelle réglementation de la cueillette des champignons dans notre pays. Car chez nous, c’est une tradition bien ancrée, qui remonte au moins à l’Empire austro-hongrois ou à la Première République tchécoslovaque. Je crois que les gens ne l’accepteraient certainement pas. D’autant qu’en République tchèque, l’accès libre aux forêts et à la nature est un droit garanti. Je ne sais pas comment on pourrait contrôler d’éventuelles restrictions en matière de cueillette des champignons. »
Quoi qu’il en soit à l’avenir, pour l’instant, les Tchèques passant leur été sur le territoire national devront se trouver d’autres occupations. Les amateurs de plaisirs simples et de nature se reporteront sur l’entretien de leur chata ou encore la préparation de bocaux de cornichons et de confitures pour l’hiver. Pour la chasse aux champignons, il faudra certainement attendre le début de l’automne – et croiser les doigts pour qu’il soit au moins un peu pluvieux.