En visite à Prague, Manuel Valls n'oublie ni Areva ni Merkel
Depuis 1998 et Lionel Jospin, Manuel Valls effectue ces lundi et mardi la première visite bilatérale d’un Premier ministre français en République tchèque. Durant toute cette année les échanges se sont multipliés et des accords, notamment dans les domaines économique, scolaire et spatial, ont été signés ce lundi. Pour autant depuis plusieurs années, ces relations sont toujours largement marquées par le dossier nucléaire et par la volonté française, par l’intermédiaire de la société Areva, d’obtenir les contrats d’agrandissement des centrales de Temelín et de Dukovany.
Mais le Premier ministre français n’était pas à Prague simplement pour effectuer quelques salamalecs. Arrivé lundi après-midi, Manuel Valls s’est entretenu au siège du gouvernement tchèque avec son homologue local, le social-démocrate Bohuslav Sobotka, avec lequel il a signé un plan de partenariat stratégique. Déjà de passage dans la capitale tchèque en octobre, le secrétaire d’État français aux affaires européennes Harlem Désir était de retour, ce qui lui a permis d’apposer sa signature aux côtés de celle du ministre tchèque de l’Enseignement Marcel Chládek pour entériner un accord en matière d’échange scolaire.
Deux autres signatures ont encore été nécessaires à la validation d’un projet de renforcement de la coopération dans le domaine spatial, la partie tchèque rappelant que Prague est le siège du système de navigation européen Galileo tandis que les Français se sont félicités de la conception future d’une fusée Ariane 6.
Ce cérémonial achevé, Manuel Valls et Bohuslav Sobotka ont donné une conférence de presse au cours de laquelle ils ont évidemment salué la bonne entente entre leurs deux pays et les perspectives de développement des échanges économiques. A ce propos, et comme depuis plusieurs années maintenant, c’est pour beaucoup le dossier nucléaire, Prague et Paris étant de fervents partisans de cette énergie, qui nourrit le caractère désormais suivi de leurs relations. Comme l’a confirmé Monsieur Sobotka, le thème a évidemment été soulevé :« J’ai informé Monsieur le ministre du fait que la République tchèque s’apprêtait à discuter la stratégie de développement de l’énergie nucléaire et que nous étudions la possibilité d’agrandir les centrales nucléaires du pays. Nous n’avons toutefois pas seulement évoqué ces perspectives mais il est important qu’il existe en Europe des pays comme la France qui comprennent le besoin de la République tchèque de conserver une part de production d’énergie nucléaire dans son mix énergétique. »
Nul doute que Manuel Valls, tout comme Philippe Knoche, le patron à titre provisoire d’Areva, était déjà au courant de ces informations. Après l’échec d’une première candidature du géant français du nucléaire dans le cadre d’un appel d’offres finalement annulé concernant la centrale de Temelín, la France mobilise sa diplomatie dans la perspective d’une deuxième chance pour une industrie nucléaire nationale dont Manuel Valls a fait l’éloge :« Notre volonté, c’est de participer ensemble à une véritable filière nucléaire européenne. De ce point de vue, nos entreprises, EDF et Areva, qui sont présentes en Europe et dans le monde, ont incontestablement des arguments à faire valoir. A ces deux entreprises de montrer qu’elles sont les meilleures et en général, d’un échec on sort toujours renforcé. »
A noter qu'un autre accord de coopération concernant le traitement des déchets nucléaires a aussi été signé durant cet après-midi décidément bien chargé.
Interrogé ensuite essentiellement sur des questions de politique intérieure par les journalistes français, Manuel Valls a passé rapidement sur la nouvelle débâcle socialiste lors d’une élection législative partielle dimanche et a défendu sa politique économique libérale face aux injonctions de la chancelière allemande Angela Merkel (CDU), laquelle a estimé ce week-end que Paris était trop lent sur le chemin des fameuses « réformes indispensables ».
« Quand j’ai rencontré à Berlin la chancelière allemande, sans que je ne lui demande rien, elle avait dit qu’elle était impressionnée par les réformes que nous avions engagées et que nous étions en train d’engager en France. Donc moi j’en reste évidemment à ces propos. »Pour le Premier ministre français, la journée de lundi s’est achevée par une rencontre avec le chef d’Etat Miloš Zeman. Ce mardi, il a participé à un forum économique franco-tchèque et avant cela, à l’ambassade de France, à un petit déjeuner commémorant celui historique de 1988 entre François Mitterrand et plusieurs dissidents tchécoslovaques dont Václav Havel. Une seconde partie de sa visite sur laquelle nous reviendrons dans notre programme de mercredi.