La France - une porte ouverte ?

L'ancien ambassadeur tchèque à Paris, journaliste et enseignant universitaire, Petr Janyska, a récemment donné à Prague une conférence sur le passé et le présent des relations franco-tchèques. Elle a eu lieu à l'Institut français de Prague, dans le cadre d'une soirée spéciale consacrée à Ernest Denis, historien français du début du XXe siècle fortement attaché à la Bohême. A cette époque et jusqu'à l'éclatement de la Seconde Guerre mondiale, la jeune Tchécoslovaquie entretenait, c'est un fait connu, des relations privilégiées avec la France. Mais que reste-t-il de ces liens aujourd'hui ? Petr Janyska :

L'ancien ambassadeur tchèque à Paris, Petr Janyska, photo: CTK

« Rien... C'est-à-dire qu'il y a énormément de liens qui existent entre les Tchèques et les Français, mais ils sont très différents par rapport à ceux qui existaient au début du XXe siècle. Ce sont des liens qui sont à nouveau à être tissés. Depuis 1989, les Tchèques et les Français se rapprochent, mais d'une manière différente. Si, après la fondation de la Tchécoslovaquie, il s'agissait des liens d'alliance contre l'Allemagne, après la Deuxième Guerre, la France conçoit son avenir, sa sécurité et sa politique étrangère à partir de l'intégration avec l'Allemagne et en élargissant cette intégration sur l'ensemble du continent européen, dont les Tchèques font aujourd'hui partie. Donc les données sont vraiment différentes. »

Fin observateur de la vie en Europe, sous tous ses aspects, Petr Janyska s'est aussi expliqué, pour Radio Prague, sur la récente crise des banlieues en France. Les voitures brûlées ne sont qu'une partie émergeante de l'iceberg, dit-il...

« Je pense que la France devra repenser son système d'intégration. Aujourd'hui, en France, on ressent un esprit de peur, de frustration, sur pas mal de niveaux on entend un discours protectionniste qui dit qu'il faut se défendre. Je trouve cela dangereux, car la France a toujours été un pays extrêmement ouvert, c'est un pays largement exportateur, je pense qu'au moins un quart des postes sont liés directement à l'exportation. Donc toute tentative hypothétique de dresser des barrages ne pourra que nuire à la France. Mais surtout : l'image de la France, c'est l'image d'une porte ouverte qui laisse entrer des gens intéressants, de qualité et qui apportent une certaine richesse. Regardez la peinture, l'école de Paris, ce sont les Japonais, c'est Miro, Picasso, Kokoschka, Kubista, Sima, c'est Soutine... Même les peintres français se laissaient inspirer par les autres. Manet, par exemple, toute la couleur noire lui provient de la peinture espagnole qu'il a vue à Madrid. Regardez Delacroix et les autres encore qui sont allés peindre au Maghreb. Donc depuis la Révolution, la France a été un pays très ouvert. C'est d'ailleurs la Révolution française qui a apporté à l'Europe, malgré toute la violence qui l'accompagnait, ces grand idéaux qui continuent à vivre. Et ce sont ces idéaux que les gens d'Asie, d'Afrique, d'Europe centrale cherchent toujours en France... »