Le TGV part en tournée en Tchéquie
Un TGV a franchi dimanche la frontière tchèque en provenance de l’Allemagne pour une tournée à travers la République tchèque. La rame de dix wagons, avec en tête la célèbre locomotive orange des années 1980, s’exposera aux regards des fans de trains pendant six jours dans le cadre d’une campagne des chemins de fer tchèque en faveur des lignes à grande vitesse.
Depuis dimanche, la rame légendaire du TGV français qui, le 26 février 1981 a franchi le record du monde de l’époque à 380 km/h, est à voir à la Gare centrale de Prague. Elle prendra ce lundi soir la direction de la deuxième métropole de République tchèque, Brno, pour être exposée au salon Rail Business Days pendant trois jours. Il passera ensuite par la gare de Jihlava le 10 juin, puis par celle d’Ústí nad Labem le lendemain, avant de retourner en France via l’Allemagne.
Légendaire à plus d’un titre, et notamment pour sa couleur orange, indissociable des débuts des lignes à grande vitesse en France, tant et si bien qu’il a été présenté au public tchèque un an seulement après la révolution de Velours, comme le rappelle au micro de la Radio tchèque, François Vielliard, employé de la SNCF et historien :
« C’est la deuxième fois qu’une rame TGV vient en République tchèque puisqu’en 1990 la rame TGV Atlantique numéro 325 record du monde en mai 1990 à 515 km/h est ensuite allée faire une tournée en Europe orientale. La chute du mur de Berlin a rendu possible tout cela, mais c’était alors la SNCF et Alstom qui voulaient promouvoir l’excellence ferroviaire française dans cette région. »
Le retour du TGV en Tchéquie en ce début de mois de juin ne va pas sans quelques critiques, certains relevant que ce passage censé être prestigieux l’était un peu moins car la rame doit être tractée sur les rails tchèques inadaptés. D’autres notant aussi que les chemins de fer tchèques étaient prêts à débourser la bagatelle de 9 millions de couronnes pour louer un train vieux de 40 ans, censé représenter le futur du ferroviaire dans le pays… La contribution d’entreprises privées a toutefois fait redescendre la facture à 2,9 millions de couronnes, et les TGV nouvelle génération étant tous actuellement en fonction, impossible de débloquer autre chose qu’une rame historique, comme l’explique Basile Maniloff qui accompagne le train en Tchéquie.
« Notre parc de TGV est utilisé à 100%. On a même déjà très peu de rames disponibles pour notre maintenance donc on a sur certains parcs une seule rame disponible pour de la maintenance et de la visite. Donc envoyer une telle rame en République tchèque serait trop laborieux. Cette rame numéro 16 est là pour raconter notre histoire, dire aux autres pays européens comment on a travaillé jusqu’aux années 1980 et comment on est arrivés dans les années 2020. »
Les premiers tronçons des lignes à grande vitesse en République tchèque pourraient commencer à être construits dans quelques années, comme le rappelle Jiří Svoboda, directeur général de l'administration des chemins de fer tchèques.
« Nous prévoyons que la construction des premiers tronçons commence en 2025. Les premiers trains transporteront des passagers sur les nouvelles lignes vers 2030. »
La République tchèque a longtemps sacrifié le rail au routier, avec plus d’un millier de kilomètres d’autoroutes construit entre 1967 et 2007. D’ailleurs, côté transport collectif, le car est souvent préféré au train pour circuler dans le pays, le réseau ferroviaire demeurant assez vétuste, avec des trains pas toujours confortables et surtout lents : aucun ne circule à plus de 160 km/h et malgré la mise en service en 2005 du train rapide Pendolino, sur les liaisons Prague-Ostrava et Prague-Vienne, il ne pousse lui-même qu’à 160 km/h, et pas partout, alors qu’il a une capacité de 250 km/h impossible à mettre en œuvre au vu de l’état du réseau.
Pionnier du train à grande vitesse en Europe, les TGV roulent, eux, à plus de 300 km/h. Le gestionnaire du réseau ferroviaire tchèque Správa železnic coopère donc avec son homologue français SNCF Réseau pour la préparation des lignes à grande vitesse dans le pays, les Français apportant leur expertise stratégique et technique. Pour Michel Teybe, ingénieur, la date de lancement prévue est réaliste :
« C’est un délai tout à fait réaliste. A partir du moment qu’aujourd’hui on est en contrat avec nos collègues tchèques pour une durée entre six et huit ans pour un montant de 8 millions d’euros. A partir de ce moment on accompagne. On a déjà accompagné, aidé à monter le référentiel technique. Maintenant, je vais avoir à valider des dispositions techniques sur les ponts puisque c’est mon métier, très prochainement vers fin juin, début juillet, pour voir effectivement s’il y a des solutions plus pérennes à mettre en œuvre que celles proposées par les ingénieurs et les constructeurs. La vitesse commerciale prévue est de 320 km/h. Bien entendu, à la sortie de Prague, sur les 10 premiers kilomètres et à l’arrivée à Brno, la vitesse est la vitesse normale de la ligne. Il faut savoir que les LGV qui seront introduites le seront avec le référentiel tchèque de LGV qui est peu ou prou basé sur le référentiel à grande vitesse français. Les futures LGV en Tchéquie seront construites pour une vitesse de 350 km/h. »
L’administration des chemins de fer tchèques a sélectionné cinq tronçons de lignes à grande vitesse dont la construction devrait être accélérée. Il s’agit des tronçons Praha Běchovice-Poříčany (qui est le plus avancé dans le processus de préparation,), Přerov-Ostrava-Svinov et Brno (Modřice)-Vranovice, ainsi que deux tronçons entre Prague et Dresde.
