Noël tchèque, fête du chant

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« Holà maître, lève-toi vite, regarde cette clarté, la beauté des cieux … » C’est ainsi que s’ouvre la Messe de Noël « Missa pastoralis » de Jan Jakub Ryba, oeuvre devenue un véritable symbole de Noël tchèque. On vient réveiller le chef d’une bergerie, et on l’exhorte à aller à Bethléem pour rendre hommage à l’Enfant qui est né pour sauver le monde. Nous devons cette messe chantée chaque Noël dans d’innombrables églises et salles de concert tchèques au compositeur Jan Jakub Ryba qui a vécu entre 1765 et 1815. Une des raisons de l’immense popularité de cette oeuvre vient du fait que le compositeur a mis en musique des paroles tchèques. Cette oeuvre qui n’est pas une messe dans le sens liturgique du terme, a donc été un pas important vers la réhabilitation de la langue tchèque dans un pays germanisé à une époque où les églises étaient réservées à la langue latine.

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Jan Jakub Ryba aimait les Noëls et s’inspirait sans aucun doute des richesses de la création populaire. Le musicologue Guy Erismann constate que sur la liste des oeuvres de ce compositeur prolifique figurent outre plusieurs «Messes de Noël» aussi une cinquantaine de «Pastorales», compositions de moindre importance qui se fondent dans l’énorme production de musique pour le temps de Noël. Sans aucun doute Jan Jakub Ryba s’est inspiré de cette abondante production populaire et les différentes parties de sa messe ressemblent beaucoup aux « koledy » c’est-à-dire dire aux Noëls qu’on chantait en Bohême et Moravie depuis les temps immémoriaux.


«Les ‘koledy’ c’est ce qu’on chante à Noël », dit une chanson de Valachie morave interprétée par l’ensemble folklorique Valašský Vojvoda. C’est le mot latin «calendis» désignant les débuts du mois, qui est à l’origine du mot «koleda» utilisé par les peuples slaves. Ils ont appelé ainsi une coutume très ancienne selon laquelle les gens allaient d’une maison à l’autre en souhaitant le bonheur à ceux qui leur ouvraient leurs portes.

Avec le temps la coutume devenait plutôt l’affaire des enfants qui chantaient et récitaient des dictons et auxquels les gens donnaient quelque chose à manger, quelques noix, quelques friandises. Cette coutume un peu utilitaire se confondait cependant avec le désir populaire d’évoquer par la chanson la naissance de l’enfant de Bethlehem et d’exprimer l’espoir que ce nouveau né apportait à toute la chrétienté.


Le musicologue Guy Erismann rappelle dans son ouvrage «La musique dans les pays tchèques » que les Noëls ne constituaient pas une spécialité tchèque et que dans tous les pays chrétiens le peuple célébrait par des chants naïfs la naissance du Sauveur. Presque partout ces chants évoquaient la scène de la crèche, les bergers, les rois mages et même le bœuf et l’âne réchauffant le Nouveau-né avec leur souffle. Le musicologue constate cependant que dans les pays tchèques ce genre musical a pris une ampleur exceptionnelle :

«En Bohême le genre est autant littéraire que musical, mettant souvent en valeur les dialectes régionaux. Quant à la musique, elle était soit empruntée à des timbres déjà existants, soit le fruit de compositions originales. Dans tous les cas c’est le même parfum de poésie naïve et de mélodies simples facilement mémorisables. Dans cette configuration littéraire et musicale, on retrouve à titre de référence des artistes, poètes autant que musiciens, comme les compositeurs baroques historiques Michna et Bridel.»

Il est difficile d’imaginer le Noël tchèque sans les «koledy». Il y a peu de chansons folkloriques qui sont encore aujourd’hui aussi vivantes. C’est pour cette raison que nous vous en avons proposé quelques-unes dans une interprétation authentique de l’ensemble Valašský Vojvoda. Elles évoquent les joies simples et modestes de nos ancêtres et nous rappellent que Noël n’était pas à l’origine cette fête de l’opulence que nous connaissons mais une fête spirituelle qui donnait aux gens un nouvel espoir. Nous vous souhaitons à toutes et à tous que cet espoir soit avec vous et ne vous quitte pas aussi en ce Noël de l’année 2009.